Emmanuel Bove, le nouvelliste oublié

Le 12/05/2023 0

Emmanuel Bove, considéré avant-guerre comme l’un des principaux écrivains français, a laissé nombre de nouvelles. Une belle redécouverte d’un grand auteur, injustement oublié.

2023 05 12 boveNé à Paris d’un père juif venu de Russie et d’une mère luxembourgeoise, Emmanuel Bobovnikoff, décide à 14 ans de devenir romancier. À cette période, son père, sans avoir quitté sa mère, vit avec une Anglaise, Emily Overweg, dont la rencontre sera déterminante pour son écriture. Envoyé en pension en Angleterre, il y achève sa scolarité et revient vivre à Paris dans une situation précaire. En 1917, il fait un mois de prison pour patronyme douteux et revenus incertains. En 1918, il fait ses classes à Guingamp, puis est affecté à Troyes, où il rencontre Suzanne Vallois qu’il épouse en 1921.
Le couple s’installe en Autriche où Emmanuel Bove se lance dans l’écriture sous le pseudonyme de Jean Vallois. "J’ai commencé par une centaine de milliers de lignes de romans populaires. J’en faisais cent lignes à l’heure, huit cents lignes par jour, c’est-à-dire un volume en dix ou douze jours. Un travail absolument étranger à celui de l’écrivain. C’est comme si j’avais, à cette époque, exercé un autre métier." déclare-t-il dans une interview à Candide, en février 1928. À Vienne, il compose aussi certaines nouvelles de Henri Duchemin et ses ombres.
Revenu de nouveau à Paris, il débute dans le journalisme et la traduction. Colette remarque une de ses nouvelles et lui propose de le publier. Il lui apporte Mes amis, premier succès. Avec Bécon-les-Bruyères, Emmanuel Bove annonce le genre nouveau de la littérature documentaire.

Il continue à publier jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
Mobilisé dès 1940, il souhaite rejoindre Londres et refuse toute publication durant l’Occupation. Il parvient à rejoindre Alger, où il écrit trois romans : Le Piège, Départ dans la nuit et Non-lieu, qui décrivent le milieu trouble de la collaboration et les incertitudes de l’époque.
De santé fragile, très affaibli par une pleurésie contractée durant son exil algérien, Emmanuel Bove meurt le 13 juillet 1945, à seulement 47 ans.

Son œuvre, rapidement tombée dans l’oubli à la Libération, est longtemps restée indisponible avant d’être rééditée à partir des années 1970.
Emmanuel Bove a publié de nombreux recueils et nouvelles dont Henri Duchemin et ses ombres en 1928, accessible librement à la Bibliothèque numérique romande.

Henri Duchemin et ses ombres : si l’on vous proposait la richesse au prix d’un crime anonyme ? Comment faut-il être pour avoir un ami, un bienfaiteur ? Un ami et sa compagne ne s’entendent plus : faut-il vraiment s’en mêler ? Vous avez vu votre amie embrasser un autre homme : mais si tout le monde vous dit que vous avez rêvé ? La folie, est-ce rompre sans raison avec tous ses proches ? Comment visiter sa famille que l’on a pas revu depuis des décennies ? Faut-il pardonner à votre compagne si elle passe la nuit ailleurs que chez vous ?
Dans l’œuvre d’Emmanuel Bove "on est frappé par une vision désespérée et désespérante de l’existence. L’homme apparaît comme une marionnette usée et désarticulée qui ne prend forme humaine qu’en s’agitant de façon absurde." confie Élisabeth Poulet à La Revue des Ressources. Pourtant l’auteur trouve les mots pour décrire dans ce recueil un moment simple et connu de beaucoup : J’aime le silence près de ma femme, je ne crois pas à la communion des âmes, mais enfin, le soir, dans le silence, près de celle que l’on aime, il y a tout de même quelque chose.

Ebooksgratuits propose Monsieur Thorpe et autre nouvelles, recueil qui réunit l’intégrale des nouvelles de l’auteur, en particulier le mythique « Monsieur Thorpe », « Rencontre », les très curieux « Petits Contes ». Bove met en scène des anti-héros, anonymes dans leur banalité, mais il transcende ces existences avec un style limpide non dénué d’humour. Selon les mots mêmes du biographe Raymond Cousse, il s’agit ici de la « mise à nu de la condition humaine ».

Lien : Emmanuel Bove, site complet

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