Le récit est à la 1ère personne en deux temps, à 8 et 25 ans. Pourquoi ce saut entre les âges : fillettes et femmes ? Pourquoi ne pas avoir opté pour une parole à un moment donné, avec des souvenirs d’enfance et une aventure contemporaine ?
Je vois trois temps dans le récit :
Ici et maintenant, le moment où Marguerite fait son récit : elle est âgée, elle raconte et, ce faisant, prend plaisir à observer la réaction de son interlocuteur (le lecteur ?).
Le temps de l’enfance : en bonne narratrice, Marguerite présente les personnages, leurs relations.
Les mêmes à 25 ans : c’est cela que Marguerite veut raconter, le rendez-vous. Pour s’en délecter. Elle a concocté le déroulement de cet événement, et le récit qu’elle en fait l’entraîne dans une sorte de délire. En effet, elle raconte, comme si elle y avait assisté, ce qu’elle n’a en réalité pas pu voir. C’est ce jour-là qu’elle a réalisé jusqu’où elle était capable d’aller.
Quels sont les trois qualificatifs principaux qui s’appliquent au personnage de Marguerite (sans divulgacher la nouvelle) ?
Marguerite est une séductrice, une personnalité complexe. D’autres mots conviendraient pour la caractériser, mais ils seraient trop précis.
Avez-vous connu une "bonne Marguerite" ? L’avez-vous créée par assemblage ou caricature ? Où est la part d’autobiographie dans le récit ?
Tout est pure fiction dans ce récit, les personnages, les lieux, les faits.
Cependant, une fois la nouvelle terminée, me sont revenues en mémoire des bribes de conversation entendues dans l’enfance à propos d’une voisine très affable et serviable. Une rumeur courait à son sujet, qui a, assurément, nourri mon imagination.
Pourquoi faire de Marguerite, personnage aussi complexe, une héroïne ? Pensez-vous que personne n’est parfait, ni irréprochable ? Un monstre reste excusable ? Tout bon cœur aussi a ses mauvais côtés ?
Marguerite est un personnage complexe et c’est ce genre de personnages qui m’intéresse. Gratter derrière la façade, travailler les failles. Je ne sais pas si « personne n’est irréprochable ou si un monstre est excusable » ; mon propos n’est pas de juger mais de donner à voir.
Et, comme dit Marguerite : vous ferez ce que vous voudrez de cette histoire.
Un langage simple, une écriture orale, un bavardage fluide et naturel : ces qualités cachent-elles une organisation rigoureuse ou un laisser-écrire au fil des idées, comme une discussion improvisée ?
Écriture orale qui demande beaucoup de concentration, beaucoup de travail, travail qui commence très longtemps avant que je ne me mette à écrire. J’ai besoin d’un long temps de maturation sans écriture. Il me faut visualiser la scène, le physique des personnages, entendre le timbre de leur voix, le rythme de leur débit, même si je ne décris rien de tout cela, j’ai besoin que ça vive dans ma tête.